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Chauffer sans réchauffer le climat
Autres innovations 04/01/2021

Chauffer sans réchauffer le climat

L’objectif de la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des bâtiments résidentiels et tertiaires est ambitieux (17 % en France). C’est un défi car il faut tenir compte du faible taux de renouvellement des bâtiments, des dizaines de millions de propriétaires et autres parties prenantes, des divers regroupements en villages, quartiers, villes... Au coeur de la nouvelle réglementation environnementale, dite « RE 2020 », qui doit définir le mode de chauffage privilégié dans les bâtiments neufs, le débat fait rage entre les défenseurs du tout électrique et ceux du gaz, chacun espérant faire pencher les arbitrages en faveur de sa solution. Quels sont les tenants et les aboutissants de cette question ?

Des solutions existent, et passent par la diminution de la demande, l’utilisation de ressources renouvelables, la mise à disposition de solutions techniques, organisationnelles et financières innovantes…

On ne parviendra à réduire l’empreinte carbone du chauffage qu’en associant électricité et gaz plutôt qu’en les opposant.

Ces trente dernières années, la performance du chauffage s’est fortement améliorée avec le remplacement progressif du fioul et du charbon par le gaz naturel et l’électricité, la production de cette dernière ayant par ailleurs évolué vers le nucléaire, l’hydraulique et le gaz naturel. Selon l’Ademe, les émissions de gaz à effet de serre liées au chauffage, à surface équivalente, ont été divisées par trois depuis 1975. Cependant, avec 400 térawattheures, le chauffage correspond tout de même à un quart de l’énergie finale globale consommée en France. C’est donc un secteur clé pour atteindre la neutralité carbone.

Aujourd’hui, le gaz naturel et l’électricité dominent largement les énergies dédiées au chauffage (voir le graphe ci-dessous). L’électricité n’est pas une énergie primaire et n’est donc pas disponible dans la nature : c’est un vecteur énergétique issu de la transformation d’énergies primaires (gaz naturel, uranium, vent, rayonnement solaire…). L’examen des sources d’énergie primaires sollicitées par le chauffage électrique montre une tout autre répartition, certes dominée cette fois par le nucléaire (environ 50 %), mais avec une part fossile loin d’être faible.


Le gaz naturel et l’électricité dominent largement les énergies dédiées au chauffage. On constate une prépondérance de l’électricité dans le secteur des bâtiments neufs, mis à part en logements collectifs chauffés majoritairement au gaz naturel.


Une question d’équilibre

La place des énergies dans le mix de demain n’est donc pas tant une question de gaz naturel et d’électricité, mais plutôt d’équilibre entre différentes énergies primaires. Une partie des ressources renouvelables sont par nature uniquement valorisables en électricité (éolien, photovoltaïque...), et d’autres, comme les gaz renouvelables et le solaire thermique, peuvent être utilisées directement pour le chauffage. Cependant, l’électricité se heurte à ses limites lorsqu’il s’agit de composer avec les variations de consommation journalières et surtout saisonnières. La difficulté pour le système électrique est à la fois de pouvoir démarrer des moyens de production électrique dédiés à l’hiver, et d’assurer le dimensionnement des réseaux autour d’une pointe somme toute brève.

Faisons un petit calcul. En 2019, la « pointe » énergétique des bâtiments a été estimée à 280 gigawatts, dont 85 ont été fournis par le réseau électrique. Leur demande énergétique minimale est de 80 gigawatts. Ainsi, dans une année 2019 virtuelle où tous les bâtiments seraient équipés en chauffage électrique, 200 gigawatts devraient être mis en réserve, et sollicités uniquement lors d’une pointe hivernale. C’est l’équivalent de 120 EPR ou 250 centrales à gaz dernier cri… qu’il faudrait éteindre l’été.

À cette aune, quelle trajectoire peut-on imaginer pour atteindre la neutralité carbone en 2050 ? D’abord, l’ampleur du problème de la pointe hivernale de chauffage doit être attaquée à la racine. Répétons-le, la première étape est la réduction drastique et rapide de la demande énergétique des bâtiments : la chasse aux fuites thermiques est ouverte depuis quelques années et doit s’intensifier. 

Deuxième front, les systèmes de production de chaleur doivent être aussi efficaces que possible lorsqu’ils s’appuient sur des ressources pilotables, qu’elles soient renouvelables (biomasse, gaz renouvelables) ou non (mais bas-carbone, comme le nucléaire de type EPR).

Par ailleurs, il est nécessaire d’adosser au solaire, à l’éolien et à l’hydraulique des capacités de stockage. En effet, des moyens de production peu pilotables sont peu utiles pour suivre l’évolution des demandes, en particulier lors de la pointe hivernale. Parmi les capacités de stockages, chacune a ses défauts et ses qualités. Citons les batteries (dont le bilan environnemental peut poser question), les stockages mécaniques, les stockages thermiques (dans de l’eau, ou d’autres matériaux plus complexes), ou sous forme d’hydrogène, qui est alors un gaz renouvelable.

L’enjeu suivant est l’échelle à laquelle installer ces divers moyens pilotables. C’est ici que se situe le vrai débat sur « la place de l’électricité et du gaz dans le chauffage » que l’on peut reformuler ainsi : « quels sont et où sont les moyens de production de chaleur les plus appropriés lors de la pointe hivernale ?» La question est d’arbitrer entre des moyens électriques pilotables centralisés et des moyens plus décentralisés, plus proches des usagers et valorisant des cycles courts et circulaires (pompes à chaleur électriques dotées d’appoint au gaz renouvelable, stockage thermique du solaire thermique, récupération de la chaleur fatale…). Ce peut être à l’échelle des territoires avec des logiques de communautés énergétiques s’appuyant sur les réseaux en place, ou bien à celle des bâtiments avec des systèmes hybrides faisant appel à des appoints pilotables et décarbonés au niveau des bâtiments.


Trois échelles

Chacune de ces échelles (centralisée, Territoire et bâtiment) offre des avantages et des inconvénients que l’on pourrait résumer ainsi : plus la production pilotable est à forte puissance (et donc centralisée), plus sa gestion est aisée techniquement, mais moins elle est performante énergétiquement du fait des pertes lors de la transformation d’une énergie en une autre. Arbitrer entre la part de chacune de ces échelles est complexe et, alors qu’il s’agit d’un problème brûlant d’actualité, il est essentiel de ne pas perdre de vue que parier sur un seul et unique avenir (souvent vu comme tout électrique) sans s’accorder une capacité de résilience et d’évolution, c’est prendre le risque d’échouer.

Pour atteindre le zéro carbone, il est urgent de ne pas se fermer d’option, de travailler sur les trois échelles, de ne pas cacher des émissions de carbone dans la production électrique centralisée et enfin d’aller chercher la performance énergétique et l’efficacité économique. C’est ce sur quoi planchent les équipes d’ENGIE. 


Les auteurs :

Benjamin Haas, ENGIE Lab Crigen et Mures Zarea, ENGIE Research


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