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Une thèse de Doctorat au Lab Crigen pour devenir acteur de la décarbonation

Une thèse de Doctorat au Lab Crigen pour devenir acteur de la décarbonation

Doctorant au Lab Crigen, un des centres de recherche du Groupe ENGIE, Malo Hustache vient de recevoir du GERG (European Gas Research Group) le Prix du jeune Chercheur Européen lors de la conférence organisée à Hambourg en juin dernier. Malo et son encadrant Nicolas Meynet, responsable de l’équipe CFD du Lab Crigen, répondent à nos questions

C'est très enrichissant et valorisant pour un chercheur de voir les applications directes de ses recherches.

Les outils de simulation permettent de tester des technologies avant qu’elles n’existent sur le marché, et contribuent ainsi à faire les meilleurs choix pour l’avenir du Groupe.

Nicolas, tu supervises les recherches de Malo au sein du Lab Industrie du Futur au Lab Crigen. Peux-tu nous dire quelques mots sur Malo ?

Nicolas Meynet

Malo nous a rejoints il y a un peu plus d'un an et demi au sein de l'équipe CFD (Computational Fluid Dynamics) et du Lab Industrie du Futur. Malo est chez nous pour étudier par simulation numérique 3D la combustion de mélanges de gaz naturel et/ou d'hydrogène. Ses travaux visent à dé-risquer et faciliter l’adoption de l’hydrogène dans les installations de combustion pour décarboner l’industrie.

Nous l’avons recruté à la fin de son stage de fin d’études d’école d'ingénieurs au Von Karman Institute for Fluid Dynamics en Belgique, où il travaillait en simulation numérique 3D sur un sujet complètement différent, les drones. Nous avons été séduits par l’énergie et la motivation de Malo et nous avons validé sa candidature. 

Depuis janvier 2023 nous avons appris à nous connaître. Une thèse, c'est une aventure au long cours, ça dure 3 ans. 3 ans à l'échelle d'une carrière, c'est court, mais à l'échelle d'un étudiant, ça peut être long, il faut être accrocheur. Malo est boxeur, et la thèse peut être vue comme un combat de boxe, si on n'y croit pas, on perd à coup sûr !

Malo, est-ce que tu peux remonter l'histoire avant ton arrivée au Crigen ?

Malo Hustache  

J'ai fait mes études à l'INSA de Rouen, avec un passage au Trinity collège de Dublin où j’ai passé un peu plus d'un an. 

Après avoir validé ma spécialité en mécanique des fluides à l'INSA de Rouen, je suis arrivé à l'Institut Von Kerman for Fluid Dynamics. L'objectif de ma thèse de Master était de simuler l'aérodynamique des pales de drones pour résoudre les problèmes de bruit.  J’ai ensuite été embauché quelques mois comme assistant de recherche puis je me suis lancé dans cette thèse qui résulte d’une collaboration entre CentraleSupélec et ENGIE.  

Nicolas, tu voulais rajouter quelque chose ?

Nicolas Meynet  

On a parlé de Malo, de son cursus, de sa personnalité, mais je voulais ajouter qu’être ingénieur au Lab Crigen demande des capacités à s'intégrer dans une équipe, à comprendre pourquoi on fait les choses dans un contexte de Groupe international.

Et ça aussi, Malo l'a parfaitement intégré et s'y est intéressé tout de suite. La recherche appliquée demande des compétences différentes de celles nécessaires pour la recherche fondamentale.

Malo Hustache  

L’application directe et concrète de mes recherches, ainsi que leurs impacts, font partie des arguments qui m'ont poussés à choisir cette thèse. Une autre motivation importante était le sujet en lui-même : il vise à faciliter la transition des industries du gaz. C'est très enrichissant et valorisant pour un chercheur de voir les applications directes de ses recherches. Au cours de mes études, j’ai eu des cours sur la combustion des gaz et la mécanique des fluides par des enseignants chercheurs très investis dans la communauté. J’aimais bien l'aérodynamique mais j'avais envie de revenir vers la combustion pour travailler sur la transition des gaz naturels vers des gaz plus verts, biométhane ou hydrogène. 

ENGIE joue un rôle majeur dans les gaz verts, et plus spécifiquement les usages futurs de ces gaz : comment faciliter leur usage et dé-risquer cette conversion. Notre partenariat s’est fait naturellement. 

Quelles sont les raisons principales qui t'ont poussées à choisir le Lab Crigen pour ton Doctorat ? 

Malo Hustache   

Les « gros » piliers de mon choix sont d’abord qu’il s’agit de recherche appliquée, et ensuite que je peux travailler sur la transition énergétique avec un de ses leaders mondiaux. Le Lab Crigen est reconnu pour ses travaux de pointe, ce qui est un atout, aussi bien en termes de visibilité que pour ma future carrière. Pour toutes ces raisons, il s’agit d’un choix stratégique, mais d’autres éléments entrent en ligne de compte.

Quand on commence une thèse, on s’engage pour 3 ans, qui peuvent par moment être éprouvants ;  il est important de vérifier certaines choses avant de s’engager :  est-ce que l'ambiance est bonne dans les labos ? Comment est le cadre de travail ? Est-ce que le sujet me passionne ? Est-ce que l’encadrement me conviendra ? 

Ce sont 3 années très exigeantes et qui demandent beaucoup de sacrifices, mais la convergence des piliers, le cadre que propose le Lab Crigen, l'encadrement de Nicolas et l’impact potentiel de ma thèse me rendent confiants.

Est-ce que tu pourrais nous expliquer le sujet de ta thèse ? 

Malo Hustache   

Ma thèse s'intitule « Modélisation de la combustion turbulente basée sur le machine learning pour la décarbonation des brûleurs industriels. » 

Le nombre de systèmes de combustion utilisés dans toutes les industries pour la transformation et les transports augmente rapidement, entraînant des problèmes de pollution de l’environnement qui deviennent des facteurs critiques dans nos sociétés. Le contrôle précis des flammes turbulentes apparaît donc comme un véritable défi. La combustion est également impliquée dans des problèmes de sécurité tels que les incendies, les feux de forêt ou les explosions.

Les flammes turbulentes sont très compliquées à simuler. L'enjeu de la science aujourd'hui est de trouver une méthode qui allie faible coût et fiabilité des résultats. L'objectif de la thèse est de créer des modèles basés sur du machine learning pour faire des simulations de brûleurs industriels, utilisés par exemple dans des fours pour le verre, le ciment ou l'acier ; des fours qui font des dizaines de mètres. A partir de ces simulations, on pourra dire au cas par cas à chacun des clients d’ENGIE si leur four peut fonctionner 100% à l'hydrogène ou si ce n’est pas le cas, quel mélange nous préconisons dans son cas.

C’est un sujet très important pour ENGIE à l'heure actuelle, mais aussi un sujet stratégique pour toute l’Europe. C'était d'ailleurs le sujet de la conférence au cours de laquelle j'ai reçu un prix. La question est de savoir si on met en place de grandes infrastructures de pipelines ou de production d'hydrogène à grande échelle pour alimenter ces industriels ? Est-ce pertinent économiquement ? Quels sont les risques ? Quel est l’impact en termes de pollution ? Autant d’aspects, techniques, stratégiques, budgétaires, et normatifs à prendre en compte !

Ce sujet est déterminant et nos simulations  permettront de valider les expériences quand elles existent, ou de donner une première indication quand elles n’existent pas. En confrontant les résultats des expériences et des simulations, on apporte des éléments de réponse pour orienter les décisions d’investissement pour le Groupe et l’élaboration des normes pour la commission européenne.

Nicolas, c'est un peu ce que vous faites dans ton équipe, vous essayez de prédire l'avenir en utilisant des outils de simulation ?

Nicolas Meynet

Je ne m'avancerais pas à dire qu’on prédit l'avenir, même si l'équipe CFD est hébergée par le Lab Industrie du Futur. Disons que les outils de simulation permettent de tester des technologies avant qu’elles n’existent sur le marché, et contribuent ainsi à faire les meilleurs choix pour l’avenir du Groupe.

L’équipe CFD du Lab Crigen existe depuis presque 30 ans, depuis l’essor de la CFD à échelle industrielle. La première application de la simulation CFD, c'était les grandes installations industrielles de combustion, des objets très compliqués sur lesquels on avait du mal à faire des expériences détaillées. Il y a eu un intérêt immédiat pour les outils de simulation appliqués à ces installations, et au fil du temps et de l'évolution du Groupe ENGIE, différentes stratégies et applications ont été mises en place. L'équipe CFD a suivi les évolutions du Groupe et nous sommes passés d'un portefeuille traitant principalement de la chaîne gazière - avec notamment la combustion du gaz naturel dans les fours industriels - à un monde où l’essentiel de notre activité est dédié aux sources d'énergie décarbonées et à leurs usages. L’équipe CFD adresse notamment l’ensemble des thématiques autour des gaz verts (biogaz, biométhane, hydrogène, ammoniac…) depuis leur production, leur transport et leur stockage, jusqu’à leur utilisation sur site industriel.

Vis-à-vis de ce nouveau portefeuille d'applications, l'équipe CFD a plusieurs rôles. La CFD est un outil suffisamment généraliste pour pouvoir être appliqué à toutes les phases d'un projet industriel. On peut s'en servir en idéation, c'est à dire avant que l'objet n’existe, pour tester de nouvelles technologies, mais les principales applications tournent autour de l'optimisation. Nous répondons aux sollicitations de clients internes et externes du Groupe qui cherchent à améliorer les performances de leurs assets. En pratique, nous faisons une simulation numérique pour, par exemple, tester un nouveau mode de fonctionnement, un nouveau design, avant d’appliquer des modifications sur l’équipement réel. Enfin, une dernière application est de dé-risquer les technologies qui impliquent un changement de pratique ou d’échelle, et c'est exactement ce que fait Malo dans sa thèse. La simulation CFD est alors un précieux outil d’aide à la décision pour les industriels. Pour passer du gaz naturel à l'hydrogène, des simulations prédictives de leurs installations doivent permettre d’évaluer la faisabilité et l’intérêt d’une conversion à l'hydrogène.

Répondre à cette question est crucial pour les industriels, et donc pour l'activité d'ENGIE. 

Malo, tu viens de recevoir un Award décerné par le GERG (European Gas Resaerch Group). Peux-tu nous en dire plus ?

Malo Hustache   

La conférence au cours de laquelle le prix m’a été décerné est la European Gas Technology Conference, qui s’est tenue à Hambourg les 18 et 19 juin derniers. Cette conférence a lieu tous les 2 ans dans un pays européen et rassemble tous les acteurs de la filière gazière européenne, universités, entreprises et institutions. Son objectif est de partager les idées innovantes et faciliter la contribution de l'industrie du gaz aux objectifs de réduction nette de consommation de l'énergie et de la mise en place des technologies de pointe.

Comment est choisi le lauréat du Prix qui t’a été remis ? 

Malo Hustache   

C'est un concours. La première étape de sélection consiste à soumettre un papier résumant nos travaux, et un pitch de 100 mots. Après cette étape, il reste 8 finalistes qui sont invités à la conférence, où ils doivent présenter leurs travaux. Le jury est composé de professeurs, de chercheurs du milieu privé et de responsables qui créent les normes européennes. Nous devons défendre notre sujet en exactement 5 minutes. Il faut vulgariser tout en  mettant en avant l’intérêt de nos travaux pour l'avenir des sociétés gazières. 

Il n'y avait qu'un prix, et c'est toi qui l'a eu. Bravo ! Qu'est-ce que ça représente pour toi ?

Malo Hustache  

C’est une très belle récompense et c’est très flatteur. Alors que je suis à peine à peine à mi-parcours de mon Doctorat, ça montre l’importance de mes travaux et valide le fait que mes recherches coïncident avec les enjeux de la société et les problèmes de demain.

C’était très gratifiant de pouvoir mettre en avant auprès d'un public pas uniquement composé d’expert les enjeux de la science et les problèmes auxquels nous faisons face.  C’était aussi une superbe opportunité d’échanger avec d'autres milieux. J'ai pu rencontrer des collègues doctorants d'un peu partout en Europe.

Et bien sûr, c'est toujours bien de gagner, et de pouvoir mettre en avant ENGIE, le Lab Crigen et surtout l’équipe CFD. 

C’est quelque chose qui peut t‘ouvrir des portes par la suite ?

Malo Hustache   

Oui, bien sûr. Ça ouvre aussi sur des sujets auxquels je n’avais pas forcément pensés, d'autres milieux, d'autres métiers. 

Mais il me reste un an et demi de thèse, je vais y aller progressivement. J'ai encore le temps avant de me poser des questions sur mon avenir.

Qu’est-ce que ça t'apporte de faire une thèse ?

Malo Hustache   

Tout au long de mes études d'ingénieur j’étais sceptique sur le fait de poursuivre une  thèse de doctorat. Je n’en voyais pas vraiment l'intérêt jusqu'à ma dernière année. J’avais une vision de chercheurs qui font de la science pour la science, sans penser à des applications concrètes. Après mon stage, j'ai compris les enjeux, j'ai vu les portes que ça ouvrirait. 

Un doctorant n’est pas juste un employé très spécialisé, il gère son projet, (parfois même un budget) avec une timeline très stricte à respecter. Il doit développer ses compétences, il a 3 ans pour devenir un expert. C'est un défi, et une thèse peut être valorisée de bien des façons différentes. 

A la fin d’une école d’ingénieur on a des bases et des compétences solides mais à la fin de ma thèse je serai un expert bien au-delà de mon sujet.

Nicolas, que dirais-tu à des jeunes pour les convaincre de faire une thèse de doctorat ? 

Nicolas Meynet

Personnellement, j’ai toujours été convaincu de faire une thèse ! J'ai même fait un post-doc, une spécialisation après ma thèse. Donc pour moi la question ne s'est pas trop posée. Par contre, si on n’a pas envie de se lancer dans une thèse, il ne faut surtout pas se forcer, parce c’est très engageant, très prenant. Une thèse ça ne peut pas se faire à moitié. 

Une fois posé ce préalable, il y a de multiples bonnes raisons de faire une thèse !

D’abord parce qu’on a le temps de faire les choses pendant une thèse et ça, je pense que c'est peut-être l'argument clé. Si on choisit un sujet qui nous intéresse, qui nous motive, on a le temps de l'étudier dans toutes les dimensions possibles. Il n’y a pas beaucoup d'occasions dans la vie où on a cette latitude, et cette liberté a beaucoup de valeur. Une fois dans un contexte professionnel, il y a d'autres avantages, mais on est pris par des contraintes organisationnelles, budgétaires, calendaires, toutes sortes de choses qui font que l’on a moins le temps.

Une autre « bonne » raison de faire une thèse, c'est l’occasion de découvrir quantité de nouveaux sujets. Autant de stimulations pour l'esprit et potentiellement de rencontres avec des chercheurs du monde entier.

Enfin, c'est vraiment très agréable de faire partie d'une communauté d’experts sur un sujet. Ça arrive peu de fois dans la vie d'être dans un microcosme aussi exaltant. Faire une thèse, c’est vivre sa passion, avoir le temps de vivre sa passion, rencontrer des gens tous aussi passionnés. 

Une dernière raison s’il en faut une, la thèse est une très bonne porte d'entrée si on s'oriente vers une carrière dans la recherche. 

Malo Hustache   

Pour certains secteurs et emplois c'est même un prérequis. 

Nicolas Meynet

Les entreprises, les grands groupes savent que quand ils recrutent un Docteur, ils ont quelqu'un qui a intégré une méthode de travail, qui est autonome, curieux, qui sait présenter un sujet, qui généralement parle anglais, en somme un profil très intéressant pour une entreprise.

Et pourquoi venir au Lab Crigen pour son doctorat ? 

Malo Hustache   

Le Lab Crigen est un des centres de recherche d’ENGIE, le centre de recherche historique depuis l’époque de Gaz de France. C'est un des laboratoires industriels sur les gaz verts qui a fait ses preuves, qui fait partie du Groupe leader mondial sur ce sujet, avec une vision transverse, de la production à l'acheminement et jusqu’à l'utilisation finale.

Au final, on travaille sur tous les aspects de la chaîne de valeur des métiers de l’énergie, avec en bonus le suivi industriel qui oblige à ce que les recherches soient vraiment appliquées.

Nicolas Meynet

Pour compléter ce que disait Malo, ce que j'adore au Lab Crigen, c'est la diversité des profils, des sujets et des projets, dans une ambiance bienveillante. 


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