La règlementation couvrant les
sites SEVESO implique de calculer les zones de danger créées par l’activité
industrielle et faire en sorte de les maîtriser. ENGIE a ainsi proposé une
solution consistant à construire une nouvelle station, baptisée Loregaz, où les
sphères de stockage neuves ne seraient plus à ciel ouvert, mais placées dans
des cylindres de béton ensablés afin d’éliminer le risque d’endommagement
majeur en contenant les effets à l’intérieur du périmètre domanial du site comme l’explique Guy Mogenot, Directeur du projet Loregaz au sein d’ENGIE GPL :
« En construisant une nouvelle station gaz à Ajaccio, nous réussissons à réduire nos zones d’effet. D’un kilomètre de rayon impliquant une population de plus de 8 000 personnes, nous passons à des zones d’effet de 170 mètres de rayon ne nécessitant que quelques changements de fenêtres pour ne plus inquiéter personne. » |
Mais le chapitre le plus inédit et le plus engageant du projet Loregaz réside dans le volet de préservation de l’environnement et de protection active de la biodiversité du site. Pour se voir attribuer un arrêté préfectoral d’exploitation, un industriel doit fournir à l’Etat des études d’impacts (technologiques, sanitaires, sonores) et mettre en œuvre des mesures d’Evitement, de Réduction et de Compensation (ou « ERC » issues de la loi sur la protection de l’environnement) afin de ne pas perturber les espèces du milieu sur lequel il s’implante.
Le terrain accueillant la nouvelle station Loregaz abrite des espèces rares et protégées d’orchidées et de tortues. ENGIE s’est ainsi engagé à compenser les effets de la construction du nouveau site de stockage en gérant pendant 20 ans, 22 hectares de terrain propices au développement des espèces endémiques identifiées. Pour Guy Mogenot « c’est un engagement très fort et, tous les ans pendant 20 ans, nous rendons compte à l’Etat de l’activité que nous menons, relativement à ces mesures de compensation ».
Afin de gérer au mieux cette délicate séquence « ERC » jusqu’en 2038, ENGIE s’est associé avec le Conservatoire des Espaces Naturels de Corse (CENC). Les équipes du conservatoire ont d’abord identifié la vingtaine d’hectares de terrain de compensation aux alentours d’Ajaccio propices au développement des orchidées et des tortues à protéger. Et durant 20 ans, les équipes du CENC assureront le suivi de la biodiversité pour le compte d’ENGIE.
Guy Mogenot l’avoue bien volontiers : il y a des mondes entre lui, industriel, et les chercheurs du Conservatoire des Espaces Naturels de Corse !
« Je sais parler de calculs, je sais parler de risques industriels mais pour parler de l’évolution de la tortue ou de comment on fait un recensement, une translocation ou une transplantation, j’étais un peu perdu d’où le besoin d’identifier chez ENGIE une personne qui puisse décoder ce langage et ces pratiques spécifiques et faire l’intermédiaire entre moi et le CENC. ».
En effet, les notions de performances et de temps pour un industriel sont presque à l’opposé de celles d’un chercheur en biologie : l’un est tenu d’apporter des données rapidement avec un indice de maîtrise élevé, l’autre se doit de respecter le temps naturel des espèces étudiées et a appris à accepter qu’on ne peut maîtriser totalement la Nature. Pour permettre à ces deux mondes de dialoguer, la direction GPL d’ENGIE a fait appel à Denis Leca, Responsable de la biodiversité officiant depuis de nombreuses années chez Storengy.
Denis a un rôle majeur dans l’avancement du projet Loregaz afin que l’engagement imposé par l’Etat à ENGIE (protéger la biodiversité pendant 20 ans sur les terres corses qualifiées et quantifiées par le CENC) soit tenu de façon pérenne et optimale. Sa première intervention a été de recréer un lien entre l’équipe industrielle et celle des biologistes du CENC.
Denis Leca et Pierre-Yves Maestracci, en alternance auprès de Denis, y sont arrivés à force de patience, de vulgarisation – voire de traduction – mais aussi de transposition des demandes administratives en plan d’actions concrètes, suivies et surtout compréhensibles par tous.
La Tortue d’Hermann est une espèce en voie d’extinction qui fait l’objet de nombreuses actions de protection notamment en Corse. Son déclin est principalement dû aux incendies de forêts et à l’urbanisation, facteurs de menace en forte expansion depuis les vingt dernières années. | |
Serapias neglecta, et Serapias parviflora sont les deux espèces d’orchidées sauvages rares identifiées sur le site d’accueil de la station Loregaz qu’ENGIE s’est engagé à protéger sur les terrains de compensation, avec l’appui du conservatoire des espaces naturels de Corse (CENC). | |
Guy Mogenot conclut : « C’est absolument passionnant mais depuis 30 ans que je travaille sur des projets industriels, je n’avais encore jamais rencontré ce genre de contraintes sur une durée aussi longue. Ces contraintes ont un coût, qu’il faut anticiper. Il me semblerait logique que ce service d’accompagnement ou ces compétences soient plus développés et déployés dans le Groupe comme une fonction support transverse à part entière ».