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De l’énergie renouvelable stockée sous la mer ?
Nouvelles énergies 22/11/2021

De l’énergie renouvelable stockée sous la mer ?

Plusieurs dispositifs de stockage de l’électricité renouvelable issue de l'éolien off shore se traduisent par l’installation de réservoirs au fond des mers.

Cet article a été écrit par Lionel Nadau - ENGIE Lab Crigen et Koen De Bauw - ENGIE Laborelec

Une cavité saline souterraine de 600 000 mètres cubes (l’équivalent de trois arcs de triomphe !)

François de Rugy en juin 2019, puis Barbara Pompili en février 2021, les ministres de l’Écologie se succèdent, mais chacun réaffirme la nécessité de développer l’éolien, notamment en mer. C’est que cette méthode de production d’électricité renouvelable est une pièce maîtresse pour atteindre les objectifs en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Cependant, elle se doit de surmonter les obstacles auxquels sont confrontés tous les autres types d’énergies renouvelables : la flexibilité, c’est-à-dire l’équilibre entre production et demande, la sécurité d’approvisionnement. Le stockage est un moyen de relever ces défis. Mais où stocker l'énergie renouvelable ? Stocker de l’électricité requiert de l’espace, un enjeu majeur du fait de l’accroissement de la population. Par exemple, une cavité saline souterraine de 600 000 mètres cubes (l’équivalent de trois arcs de triomphe !) remplie d’air comprimé ou d’hydrogène dédié à la consommation quotidienne de 265 000 foyers (13 gigawattheures) a une emprise au sol de 2,25 hectares. Avec des batteries qui équiperaient chacune des habitations, la surface occupée serait au total de 9,92 hectares. Même si de nouvelles générations de batteries réduiront cet impact, on doit chercher à diminuer cette emprise terrestre.

Une idée consisterait à stocker de l’électricité en mer, près des éoliennes.

Une telle solution diminuerait en outre le coût des raccordements de ces parcs offshore aux réseaux terrestres et améliorerait considérablement la flexibilité de l’offre électrique.  De plus  un stockage local de l’énergie serait idéal pour de futurs parcs éoliens flottants, indépendants du réseau et en eaux profondes, conçus pour répondre aux besoins du transport ou d’une plateforme polyvalente éloignée de côtes.

La première idée qui vient à l’esprit serait d’intégrer le stockage d’énergie à l’intérieur ou le long des fondations qui arriment les éoliennes au fond en ajoutant des réservoirs. L’usage des infrastructures serait ainsi optimisé, mais ce n’est pas si simple… Il existe de nombreux obstacles :

  • La complexité du comportement dynamique des grandes éoliennes. De fait, les futures installations de plus de 10 mégawatts, annoncées avec des rotors de 240 mètres de diamètre, devront composer avec des marges minimales entre les fréquences de résonance de la structure globale fixe et les fréquences des vents et des vagues, ce qui laisse peu de marge de manœuvre quant à la distribution des masses dans la fondation.
  • Le stockage d’un volume d’eau important et variable dans une cavité associée à la fondation ajouterait des contraintes importantes à la conception.
  • La fabrication des fondations des éoliennes est aujourd’hui une activité mature, fondée sur des pratiques industrielles standardisées et éprouvées qu’il faudrait alors réviser profondément.

Au final, les concepteurs d’éoliennes ainsi que les organismes de certification hésitent à s’engager dans la voie de ce type de stockage. Ces contraintes seraient encore plus importantes pour les éoliennes flottantes pour qui les fondations s’apparentent plus à des barges de flottaison. Dans ce cas, les variations importantes de la masse des fondations auraient un impact encore plus important sur le comportement global.

De plus, imaginer de grands vides dans les fondations pour contenir d’importants volumes d’eau de mer ou d’air pressurisé entraîne des exigences supplémentaires, par exemple en matière d’épaisseur des parois et de protection contre la corrosion. Enfin, dernier écueil, le développement des éoliennes flottantes est encore loin d’être mature.

Certains projets tentent de relever ces défis, comme le prototype FLASC qui consiste en un système de stockage intégré dans un dispositif flottant équipé d’une éolienne, de panneaux solaires ou de tout autre générateur d’électricité. D’autres choisissent de s’en affranchir. Ainsi en serait-il d’un stockage mis en œuvre à distance des éoliennes, par le biais de structures supplémentaires dédiées, installées au fond des mers. Cette piste a une plus grande probabilité de trouver son chemin vers l’industrie.

De l'air au fond des mers ? 

Parmi les diverses technologies de stockage aujourd’hui à l’étude, deux sont déjà à un stade avancé : le stockage par air comprimé et la station de transfert d’énergie par pompageBien adaptées aux conditions maritimes, elles autorisent le stockage de grandes quantités d’énergie.

  • Le stockage  par air comprimé :  développée par Segula Technologies, consiste en une plateforme flottante, une sorte de bateau, contenant un système de compression hydraulique performant et des réservoirs en béton, posés sur le fond marin, où est retenu l’air comprimé.


Le fonctionnement se décompose en trois étapes. D’abord, un tube est rempli d’air puis fermé. Ensuite, de l’eau est injectée grâce à une pompe hydraulique : l’eau, en remplissant le tube, réduit le volume de l’air et le comprime. Enfin, lorsque la pression de l’air est suffisante, l’air comprimé est injecté dans les réservoirs sous-marins afin d’y être stocké.

Et l’électricité ? Quand elle est nécessaire, les tubes sont remplis d’eau puis reçoivent de l’air provenant des réservoirs. L’eau est alors chassée vers une turbine qu’elle actionne. La production d’électricité s’arrête lorsque les réservoirs d’air sont vides. L’eau utilisée dans ce stockage aide à limiter l’échauffement de l’air lors de la compression et son refroidissement lors de la détente. Avec cette alliée thermique, le rendement électrique atteint 70 %, contre 40 % environ pour d’autres systèmes similaires. Notons que ce type de stockage peut aussi fonctionner pour des champs de panneaux solaires installés à proximité du littoral.

La mer de haut en bas

  • La station de transfert d’énergie par pompage :  le projet StEnSea (pour « Storing energy at sea ») est développé par l’institut Fraunhofer des technologies et de l’économie des systèmes énergétiques, à Kassel, en Allemagne. Il exploite le principe des stations de transfert d’énergie par pompage (STEP), un type d’installation hydroélectrique constitué de deux bassins situés l’un au-dessus de l’autre. La puissance de l’installation est déterminée par la différence de hauteurs entre les deux et la quantité d’énergie stockée par le volume d’eau retenu. Quand la demande en électricité est faible, l’eau du bassin inférieur est pompée vers celui du des- sus. Sinon, l’eau est relâchée du bassin supérieur vers celui du bas, entraînant sur son passage une turbine qui produit l’électricité.


Une station de transfert d’énergie par pompage, adaptée aux conditions marines. Dans le projet StEnSea, le bassin supérieur est la mer et le bassin inférieur des boules en béton immergées de 30 mètres de diamètre contenant une pompe-turbine réversible (voir la figure ci-contre).


La puissance de l’installation dépend de la hauteur de la colonne d’eau, tandis que la capacité de stockage est proportionnelle au nombre de boules. Chacune de ces dernières peut contenir 20 mégawattheures d’électricité, soit la consommation quotidienne de 400 foyers français. Lors du stockage, l’eau contenue dans une boule est rejetée par pompage, alors que lors de la production d’électricité, la boule est remplie d’eau, produisant de l’électricité sur son passage au travers de la turbine.

Ces deux technologies ont d’ores et déjà fait la preuve de leur efficacité. Verra-t-on un jour proliférer les réservoirs de béton au fond des océans ?

RÉFÉRENCES

Lionel Nadau - Energy storage expert - ENGIE Lab Crigen  
Koen De Bauw -  Chief Technologist - ENGIE Laborelec

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