Si l’éolien est aujourd’hui une source d’énergie propre bien établie, on ne peut pas dire qu’elle soit des plus discrètes. Et à mesure qu’elles vieillissent, au milieu des champs comme au large des côtes, la question commence en effet à se poser :
De plus en plus de structures éoliennes taille XXL sont en passe d’atteindre la fin de leur cycle de vie de 20 ans. Le besoin d’éviter un amoncellement considérable de déchets se fait de plus en plus urgent : si environ 85 % des matériaux utilisés dans les turbines sont recyclables, les pales, elles, nécessitent à la fois résistance et agilité. Ces dernières sont donc fabriquées à partir de matériaux tels que la fibre de verre, la résine et la mousse – des matériaux généralement non biodégradables et beaucoup plus difficiles à recycler.
Partout dans le monde, des entreprises travaillent à la fabrication de pales plus durables, en vue de rendre le processus de production plus écoresponsable. D’autres encore concentrent leurs efforts et leur créativité sur la réutilisation des quelques milliers de turbines mises hors service chaque année.
Dans le cadre du projet Re-Wind, une équipe de recherche interdisciplinaire et internationale composée d'experts de l’Université de la ville de New York, du Georgia Institute of Technology, de l'University College Cork et de la Queen's University Belfast propose des alternatives intelligentes aux méthodes traditionnelles d’élimination des déchets comme le dépôt en décharge et l'incinération.
Dans le nord de
l'Allemagne, une entreprise de gestion des déchets a trouvé un moyen d'alimenter une cimenterie grâce à des pales d’éoliennes démantelées.
Cette méthode inédite, mise au point par la société Geocycle, comprend plusieurs étapes. La première prend place sur le parc éolien, où les pales sont coupées en morceaux de 10 mètres avant d’être transportées vers une usine de prétraitement. Là, les lames sont déchiquetées en petits morceaux et les métaux sont séparés grâce à l’utilisation d’aimants. Enfin, la poudre de pale broyée est mélangée à un matériau de substrat humide constitué d'autres résidus, comme des déchets d'emballage, afin de lier le tout.
À la cimenterie, ce système de waste-to-energy repose sur un double procédé via lequel le contenu organique des déchets de pales est valorisé sous forme d'énergie thermique, et la partie minérale (issue du broyage des fibres de verre) remplace en partie le sable et l'argile carbonée nécessaires à la production de ciment. Résultat ? Une réduction de 27% des émissions de CO2 et de 13% pour ce qui est de la consommation d'eau.
À ce jour, la cimenterie du groupe LafargeHolcim à Lägerdorf, en Allemagne, reste la seule usine d’Europe au sein de laquelle cette technologie de valorisation énergétique des déchets a été mise en œuvre.
Le cycle de vie des turbines du parc Windy Standard en Écosse atteindra son terme en 2027. Consciente de la nécessité de remplacer les anciennes structures par de nouvelles, l’entreprise propriétaire Fred Olsen Renewables compte se tourner vers des solutions de recyclage et de réutilisation des matériaux mis hors service.
La société espagnole Siemens Gamesa a fait passer la durabilité de l'énergie éolienne au niveau supérieur en créant la première pale entièrement recyclable au monde, la bien-nommée RecyclableBlade.
À l’instar des pales traditionnelles, cette innovation est composée de matériaux de renforcement combinés à une résine pour former une structure à la fois légère, solide et rigide. Là où la méthode se distingue de la production standard, c’est dans l'utilisation d'une nouvelle résine dotée d’une structure chimique différente, qui lui permet d’être dissoute efficacement lorsque son cycle de vie touche à sa fin.
Afin de séparer les matériaux composites, la pale est immergée pendant plusieurs heures dans une solution acide chaude. Les pluies acides n'ont ainsi aucun effet sur les pales, le phénomène de dissolution ne pouvant se produire que lorsque l’ensemble des facteurs sont réunis.
Une fois décomposés dans la solution acide, les matériaux des lames peuvent être utilisés dans le cadre de biens de consommation, notamment des téléviseurs à écran plat ou des valises. L'entreprise estime que si ses pales sont utilisées sur tous les nouveaux projets d'éoliennes d'ici 2050, 10 millions de tonnes de déchets pourraient être évitées dans les décharges.
En France, un consortium intersectoriel comprenant ENGIE Green et le centre de recherche français IRT Jules Verne a lancé un projet baptisé "ZEBRA" visant à fabriquer des pales d’éoliennes 100% recyclables.
L'objectif sur le long terme est de concevoir une solution durable sur l'ensemble de la chaîne de valeur, où la fabrication automatisée réduira la consommation d'énergie et les déchets, et où de nouvelles méthodes de recyclage seront utilisées pour transformer les prototypes de pales en nouveaux produits.
Le projet s’est récemment renforcé grâce à un nouveau partenariat avec la société de produits chimiques spécialisés et de matériaux avancés Arkema, qui a développé un nouveau type de résine (Elium) à même de rendre les pales éoliennes entièrement recyclables après un processus de dépolymérisation. Les pales à base d'Elium permettent également de réduire la consommation d'énergie, car leur moulage requiert une température plus basse.
Le projet initial d'ENGIE Green, "Les pales du futur" lauréat des Trophées de l'Innovation ENGIE 2020, a finalement été lancé avec les partenaires de ZEBRA pour une durée de 42 mois avec un budget de 18,5 M€.
Photo : SUPERUSE STUDIOS/Denis Guzzo
Engagé dans une démarche d’amélioration de la filière recyclage des éoliennes en France, ENGIE a conclu un partenariat avec SUEZ, permettant aux deux entreprises de monter en compétence au travers d’opérations communes mobilisant leurs expertises respectives. | ||
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