Si je ne réalise pas quelque chose qui me tient à cœur parce que j'ai peur, quel exemple suis-je ?
Depuis toujours, Anne Rotschi s’investit dans des actions pour la paix et pour les autres. Elle rêvait de participer à des projets humanitaires. Elle a su saisir une opportunité de poste chez Energy Assistance France pour vivre son engagement au quotidien.
Anne, parlez-nous de votre parcours, de ce que vous faites chez ENGIE et Energy Assistance France
Je suis ingénieur de formation. J'ai toujours travaillé dans le domaine de l'énergie, et chez ENGIE depuis 2001. J'ai pris une disponibilité de plusieurs années pour suivre mon conjoint à l'étranger et nous sommes partis vivre en Malaisie. Là-bas j’ai eu l’opportunité de me former au coaching, et j'ai accompagné des adultes dans leur transition professionnelle. Nous sommes ensuite partis pour les États-Unis où je me suis formée au coaching des enfants, que l’on peut accompagner dès l'âge de 6 ans. J'ai donc mis à profit mes années à l'étranger pour me former à quelque chose qui me passionne. Quand je suis revenue en France, Energy Assistance France recherchait un/une responsable de projets humanitaires, et j'ai postulé. Depuis un peu plus de 2 ans, je suis responsable de projets humanitaires liés à l’accès à l'énergie, des projets destinés à des populations qui ont peu ou pas d’accès à l'énergie dans des zones très isolées.
Mon rôle est d'aider Energy Assistance France à préparer les projets et à concrétiser les missions. J'accompagne les chefs de projet et les équipes sur les plans logistiques, administratifs, les études, les partenariats, la communication.
Comment Energy Assistance France est soutenue par ENGIE ?
Energy Assistance a été fondée en 2001 en Belgique ; puis en 2005 a été créée l’ association Energy Assistance France, de loi 1901 . C'est une ONG adossée à ENGIE dont les acteurs sont des salariés ou des retraités du Groupe. Nous réalisons aussi certains projets en coordination avec ou pour la Fondation ENGIE.
Nous intervenons sur tous les continents où le manque d'infrastructures pèse lourdement sur les populations qui vivent dans des zones isolées. L'accès à la santé, à l'éducation et au développement économique sont nos trois axes d'action. Avant la pandémie, nous réalisions une vingtaine de missions par an en Asie du Sud-Est, dans différents pays d'Afrique, dans des pays où les risques sécuritaires sont jugés modérés, car nous sommes très soucieux de la mise en sécurité de nos bénévoles.
Etes-vous rattachés à la Fondation ENGIE ?
Non, nous sommes indépendants de la Fondation. Nous sommes une association avec son propre bureau, des administrateurs, un fonctionnement propre. Ça ne nous empêche pas de collaborer étroitement et d'être en soutien de la Fondation quand ils ont des demandes d'intervention sur l'accès à l'énergie.
Il y a de multiples façons de changer le monde. Et je pense que vous en avez adopté plusieurs !
J'ai été toujours curieuse des cultures différentes de la mienne. Toute jeune, j'ai participé à un camp international pour construire la paix où j'ai rencontré des gens de différents pays que je n'aurais jamais rencontrés autrement.
A l’occasion des jeux mondiaux des transplantés, à Nancy, j'ai rencontré des gens du monde entier qui étaient là pour le sport, pour promouvoir la transplantation et les dons d’organes. Quand j'étais étudiante, je me suis investie dans l'association solidarité de mon école d'ingénieur et nous avons participé à différentes actions, que ce soit le Téléthon ou la restauration de logements sociaux dans les corons du Nord de la France, des actions solidaires avec des gens moins privilégiés que moi dans mon pays, mon entourage, mais aussi ailleurs.
Je poursuis cet engagement au sein d’Energy Assistance France en contribuant à favoriser une vie meilleure en milieu rural et à donner un avenir aux enfants et aux familles de villages isolés.
Vous venez de participer à une mission à Madagascar ?
Au sein d'EAF, je suis habituellement en appui des équipes. Participer à cette mission a réalisé un de mes rêves d’enfant. J’avais l’habitude de préparer ces missions, mais le vivre est bouleversant à tout point de vue. C'est dur physiquement parce qu'on est sur un chantier. Pour moi qui ai toujours travaillé dans des bureaux et qui ne connaissais pas le monde du chantier, ça a été un premier choc !
Mais plus encore, j’ai ressenti un choc culturel en découvrant la réalité des personnes que nous avons rencontrées là-bas, en ressentant leur simplicité et leur joie de vivre malgré leurs conditions de vie.
Nous sommes partis pour Madagascar au mois de novembre 2021. Nous avons électrifié un lycée de brousse et une épicerie. Grâce au solaire, l’épicerie permet un développement économique grâce à un frigo et la possibilité de recharger des téléphones.
Quant au lycée qui dispose d’un internat, les parents étaient de plus en plus réticents à inscrire leurs enfants à l'internat à cause de l’absence d'électricité. Pour nous, c’est très important de permettre l'accès à l'éducation à de jeunes lycéens. Et plus encore, les élèves vont enfin pouvoir faire des travaux pratiques liés à l'informatique qui sont au programme de terminale et qui étaient impossibles par manque d’électricité. Ils auront ainsi autant de chances que les lycéens des villes et peut être d'aussi bons résultats.
C'était vraiment émouvant de percevoir l'impact immédiat de notre action. De même, pour travailler le soir, pour faire leurs devoirs, ils utilisaient des bougies ou des lampes à pétrole mais c’est potentiellement dangereux, et cela les expose à un air pollué.
Pour les professeurs, nous avons installé des kits solaires avec une lampe et de petits panneaux sur les logements de fonction, ce qui permet de recharger un téléphone et d'avoir de la lumière. Pour nous, c’est une chose à laquelle nous ne faisons même plus attention, mais tout le monde n'a pas cet accès à l'énergie.
Concrètement, qu’avez-vous fait pendant cette mission ?
Nous sommes partis à 4 : un chef de mission retraité et chevronné qui connaît aussi très bien la technique, un technicien spécialiste de la distribution électrique, une cheffe de projet solaire qui était déjà partie comme cheffe de projet en mission EAF et moi-même.
Nous sommes partis 12 jours car il fallait tenir compte des tests PCR obligatoires à l'arrivée et au départ. Ensuite, nous avions une bonne journée de trajet, 3h de route et 3 heures de piste, pour nous rendre sur la zone d'intervention, dans les terres à l'ouest de la capitale.
Notre première tâche a été d’inventorier le matériel reçu. En effet, nous faisons livrer le matériel acheté localement autant que possible à l’avance, mais quand on fait l'inventaire, on a toujours des surprises. Nous avons évalué ce que nous pouvions faire avec ce qu'on avait et trouvé des solutions.
Nous avons commencé par le chantier d’électrification du lycée, en réfléchissant à l’emplacement des tranchées pour relier le local technique, le lycée, le dortoir, les sanitaires. Nous avons eu de l'aide locale pour creuser les tranchées, et par chance il avait plu la veille au soir ce qui a permis de rendre le sol plus meuble.
Nous avons travaillé en binôme. Un binôme s'occupait de préparer les rails de montage des panneaux solaires et de fixer des panneaux solaires en toiture. L’autre binôme avait la charge d'installer la centrale dans le local technique, de commencer la distribution électrique, de poser les prises, les interrupteurs, les luminaires.
C’est un travail que je n'avais jamais fait, et j’ai beaucoup aimé apprendre comment tirer des câbles, d'un point A à un point B. J'ai découvert la pose de fourreaux, le passage de câble dans les fourreaux et j'ai bien aimé faire ça. C'est un travail d'équipe, et c’était un beau moment avec l’équipe EAF et les bénéficiaires.
Ensuite, nous avons fait la distribution électrique en passant si possible par les combles, puis le raccordement des tubes LED dans les trois salles de classe. On n’a pas chômé ! Nous avons réussi à faire tout ça en 3 jours : nous avons eu une frayeur lorsque le convertisseur s’est mis en alarme le soir du test. Fort heureusement, avec les conseils du fournisseur, le lendemain matin, tout a bien fonctionné ! Nous avons pu partir pour l'épicerie. Là tout a bien fonctionné aussi. Nous avons posé 2 panneaux solaires en toiture pour un petit local de de 6 m². Je me suis rendue compte qu’en quelques jours j’étais vraiment montée en compétence, et nous avons terminé l’épicerie très vite. Ensuite, le temps de faire des photos pour documenter la mission et nous sommes repartis.
Nous avons eu la chance d’avoir de bonnes conditions météo, personne n'a été malade , tout s'est bien déroulé.
Un message à partager ?
Il y a deux choses auxquelles je pense souvent, et qui ont certainement orienté mes choix de femme, de professionnelle et de mère.
Si le monde encore aujourd'hui est dominé par les hommes, c'est peut-être parce que les femmes manquent de bienveillance les unes envers les autres. Si elles prenaient conscience de l’énergie perdue à se comparer, à dire du mal, à juger trop vite, si on mettait tout ça de côté pour mettre notre énergie dans des choses plus constructives, peut-être que les femmes prendraient les places qu'elles devraient avoir dans la société civile et dans l'entreprise.
L’autre chose est mon rôle d’exemple, en particulier pour ma fille. Quelle image mes choix de vie donnent-ils à ma fille ? Si je me mets en retrait, si je ne prends pas les choses en main, si je ne défends pas mes droits, si je ne prends pas d'initiative, pas de de risques, qu'est-ce que ça dit à ma fille ? Si je ne réalise pas quelque chose qui me tient à cœur parce que j'ai peur, quel exemple suis-je ?
Surtout avec ma formation de coach, je dois montrer l'exemple et si possible Inspirer les autres et notamment les petites filles. Et cette pensée me booste, m’aide à ne pas lâcher.
Et pour revenir sur la mission, vous repartiriez demain ?
Peut-être pas demain, j'ai encore besoin d'un peu de temps pour repenser à tout ça, bien le digérer. Mais oui, définitivement, dès que j'en aurai l'occasion dans les mois ou les années qui viennent, j'ai très envie de repartir en mission.
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